J’ai une petite fille. C’est mon premier enfant et elle s’appelle Blanche. Quand je l’ai eue, je voulais prendre le temps de m’occuper bien d’elle. C’est pour cela que j’ai décidé de planifier. Une voisine m’en avait parlé, alors je suis allée me renseigner dans un centre de santé.
Là on m’a bien expliqué : les méthodes, comment on faisait, le carnet pour le suivi, ce que je ferai quand je serai prête pour avoir un autre enfant. J’ai choisi les injections parce que c’est moins contraignant. Quand j’arrive à la maison après le travail, je suis souvent fatiguée et j’avais peur d’oublier la pilule. Les injections c’est tous les trois mois, alors c’est plus facile.
« Blanche est encore petite, c’est pas bon de prendre ventre »
Au début, je n’ai rien dit à mon mari. Mais je n’étais pas à l’aise parce qu’il faut la confiance entre la femme et son époux. Puis un soir, la télévision a montré une émission sur la planification familiale. On l’a regardée tous les deux. Mon mari a dit qu’il avait discuté de ça avec un ami et qu’il avait voulu en parler avec moi après. Il pensait qu’on pourrait essayer maintenant que Blanche était là avec nous. Quand j’ai dit que j’avais déjà commencé, il m’a demandé pourquoi je ne lui en avais pas parlé avant. J’ai répondu que je n’étais pas sûre qu’il soit d’accord. Je savais qu’il se posait encore des questions, mais quand même il voyait que c’était mieux pour la famille si on attendait un peu avant d’avoir d’autres enfants. Mon papa aussi a été cool : « Blanche est encore petite, il m’a dit un jour, C’est pas bon de prendre ventre ». Je n’ai pas osé lui avouer que je planifiais déjà, mais comme Blanche a aujourd’hui 4 ans et que je n’ai pas d’autre enfant, je crois qu’il a bien compris.
Moi j’ai de la chance, mais pour d’autres c’est compliqué. Ma cousine par exemple. Le pasteur de son église évangélique est contre les méthodes contraceptives. Donc dans sa tête, c’est contre Dieu. Alors elle ne prend rien et elle tombe enceinte très vite après chaque enfant. Elle en a déjà trois avec juste un an d’écart. Et puis on entend aussi beaucoup de bêtises. Je connais une coiffeuse qui me tresse. Elle croit que la planification rend stérile, qu’elle ne pourra plus faire d’enfant et qu’en plus, ça fait grossir. Je lui ai expliqué : « Le jour où tu veux faire enfant, tu peux arrêter le traitement. Et regarde-moi : est-ce que j’ai pris du poids ? Est-ce que mon mari m’a quitté parce que je ne suis plus élancée ? ».
« Si j’avais d’autres enfants, je serai obligée d’arrêter de travailler et cela ferait encore moins d’argent à la maison »
Ici, quand les gens ne connaissent pas, ils disent « C’est compliqué », « C’est pas bon » ou « Ça crée des problèmes ». Voilà pourquoi je donne des conseils autour de moi. Je raconte bien comment ça se passe vraiment quand on planifie. Une de mes collègues de travail a eu un bébé et elle est retombée enceinte juste après. Elle a dû avorter. Elle m’a raconté qu’elle avait pris la pilule mais avait arrêté. C’est pour ça qu’elle était retombée enceinte. Maintenant elle fait ait des injections, comme moi. Je lui ai dit de bien suivre les rendez-vous pour ne pas interrompre le traitement.
Comme je n’ai pas encore d’atelier de couture à moi, il va falloir attendre encore avant d’agrandir la famille. Pour économiser « un peu, un peu » comme ont dit ici. Et pour que Blanche ne manque de rien. Si j’avais d’autres enfants, je ne pourrai pas gérer, je serai obligée d’arrêter de travailler et cela ferait encore moins d’argent à la maison. On verra plus tard, quand nous serons prêts mon mari et moi. Ce qui compte, c’est d’abord qu’on soit bien, pas combien on est.