La Côte d’Ivoire s’est inscrite dans une dynamique multilatérale visant à relancer les efforts en matière de planification familiale. En compagnie de 8 autres pays francophones d’Afrique de l’Ouest, nous participons au Partenariat de Ouagadougou (lancé en 2011) ainsi qu’au partenariat mondial Family Planning 2020 (initié en 2012).
Des engagements publics ont été pris par les autorités ivoiriennes : atteindre 36% de prévalence contraceptive en 2020 (soit 514.000 nouvelles utilisatrices de méthodes contraceptives modernes) et allouer au moins 500 millions de francs CFA pour l’achat des produits contraceptifs. La ministre de la Santé et de l’hygiène publique s’est engagée à mettre en œuvre la « révolution contraceptive » qui est préconisée par le Plan national de développement 2016-2020. Un plan d’action national budgétisé a d’ailleurs été adopté pour la même période.
« Le Ministère doit accroître le niveau de priorité de la planification familiale »
Il faut dire que la situation est inquiétante en Côte d’Ivoire : 3 femmes meurent toutes les 2 heures des suites d’un accouchement, 15% des femmes décèdent pour cause d’avortement, le taux de mortalité infantile atteint 60‰, le taux de fécondité s’élève à un peu plus de 3,5 enfants par femme et le nombre de grossesses en milieu scolaire frôle les 4.500 depuis la rentrée 2016-2017. Malgré cela, le financement des produits contraceptifs reste un problème. Au niveau sous-régional, le Burkina Faso a créé dès 2011 une ligne budgétaire annuelle de 500 millions de francs CFA, engagement qui est devenu une sorte de référence pour les pays donateurs. La Côte d’Ivoire s’est inscrite dans cette dynamique pour la première fois en 2016 en allouant 400 millions de francs CFA à l’achat des produits contraceptifs. Mais la reconduction de cette dotation ne semble pas encore acquise. Qui plus est, elle figurait sur une ligne comptable dédiée aux « achats de produits pharmaceutiques ». D’autres dépenses pouvaient y donc être imputées hors produits contraceptifs, affaiblissant d’autant l’engagement pris.
Plusieurs acteurs de la société civile ont alors décidé de mener un plaidoyer commun afin de rappeler leurs engagements aux responsables politiques. Notre première demande est que le Ministère accroisse le niveau de priorité de la planification familiale. Il faut également créer des synergies multisectorielles avec d’autres ministères concernés. Enfin, nous militons pour qu’une ligne budgétaire soit explicitement dédiée aux « achats de produits contraceptifs et intrants pour la planification familiale », dotée d’un financement pérenne d’au moins 500 millions de francs CFA annuels. En juillet 2017 se tiendra à Londres le Sommet FP2020 : la Côte d’Ivoire aura à rendre compte de son bilan en faveur de la planification familiale. Pour éviter de faire pâle figure, nos autorités doivent s’engager à financer la demande et l’offre de services et permettre la dispensation des contraceptifs oraux et injectables par les agents de santé communautaire. La Côte d’Ivoire rejoindrait alors le club de pays (Togo, Niger, Sénégal, Ethiopie, Burkina Faso) qui ont réussi à améliorer le taux de prévalence contraceptive.
« La planification familiale au cœur de la future loi sur la santé sexuelle et de la reproduction »
Autre enjeu d’actualité : une future loi sur la santé sexuelle et de la reproduction. Bloqué par la crise de 2010-2011, le processus a été relancé par arrêté ministériel. Un groupe technique a ainsi réuni des représentants de l’autorité publique, des soignants, des ONG nationales et internationales, dont MDM, des leaders religieux, des représentants de jeunes et des partenaires internationaux.
Deux ateliers, ainsi que les travaux préparatoires, ont permis de poser un diagnostic, de générer des pistes de solutions et de rédiger un avant-projet de loi qui a été validé par le ministère de la Santé. La planification familiale est au cœur de ce travail : accès à la prévention, aux produits contraceptifs (proximité, disponibilité, prix) et aux soins de qualité. D’ici quelques mois, il y aura un débat à l’Assemblée nationale. Espérons que tous auront en tête les enjeux du dividende démographique soulignés par le plan national de développement, mais aussi la réalité que vivent les femmes et les jeunes filles du pays.